Catherine Chastagner

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Dépêche-toi ! Parents : comment arrêter de courir...?

02/02/2022

Dépêche-toi ! Parents : comment arrêter de courir...?

Le premier enjeu de la bienveillance est de pacifier le rapport au temps. C'est un des gros défis des parents, pris dans la logique de réalité avec ses agendas, timing, obligations, alors que l'enfant vit simplement dans le présent : comment accompagner l'enfant à se caler sur "l'emploi du temps" en évitant les "dépêche-toi" à répétitions qui finissent en général en énervement voire plus ...?

Vivre avec son temps

La bienveillance est la capacité de veiller au bien de soi et de l'autre à court et à long terme. Il est bienveillant de veiller à ce que l'enfant apprenne petit à petit à gérer son temps et à savoir s'adapter au "temps" qui fait lien social, qu'il apprenne petit à petit à savoir faire avec son temps intérieur et avec le temps extérieur. Pour cela, le parent est le premier exemple vivant : comment vit-il son rapport au temps ? Tendu comme un élastique prêt à craquer ? Pacifié ? "Je m'en-fout-tiste" ? 

La bienveillance commence par prendre soin de soi. Le premier pas pour apprendre à son enfant à gérer le temps est de prendre le temps, en tant que parent, de prendre soin de soi, de se donner du temps, de prévoir des temps de relâchement de la pression. C'est le premier pas, et peut-être le plus difficile dans la vie de parent actif qui jongle entre le travail, les enfants, l'école, les activités, la vie de famille, les relations, le sport (parce qu'il faut prendre soin de son corps, non ?), etc... 

Ajuster son tempo personnel, unique, qui ne peut être comparé à celui des autres (par exemple aux supers mamans et supers papas qui arrivent à tout concilier...), et ajuster son timing extérieur : emploi du temps, temps à passer à chaque chose, etc...

Le temps c'est de l'amour...

... chante Pascal Obispo dans "Lucie". Ainsi, en tant que parent, se donner du temps, c'est s'aimer ! Donner du temps à votre enfant, c'est montrer que vous l'aimez ! Nous vivons dans une société exigeante, et la plupart de parents d'aujourd'hui ont été éduqués au XXème siècle sous le règne de l'exigence : fais ça, sinon... ! Dépêche-toi, sinon ...! Le sinon est la porte ouverte à la violence verbale voire physique. Combien de parents aujourd'hui sont malheureux lorsqu'ils s'énervent au point de crier sur leurs enfants, ou  de les taper. Leur recherche est surtout dans le comment, comment faire autrement ? Apprendre à nos enfants la vie sociale, le respect de certaines règles, sans en arriver à ces extrêmes qui sont devenus ordinaires ?

 

De l'exigence à l'attente

C'est là que le temps est l'ingrédient essentiel : donner du temps à l'enfant pour faire ce qu'on lui demande, par exemple en utilisant un timer ou un minuteur et décompter le temps : dans 10 minutes nous partons,  dans 5 minutes, combien de temps reste-t-il au timer ? ...

De l'autre côté, comme le revers de la même pièce, il s'agit d'aider l'enfant à attendre, à gérer ses frustrations : introduire du temps  en ne répondant pas tout de suite à ses demandes (ou exigences). Lorsque l'enfant est petit, le laisser attendre quelques secondes, quelques minutes, puis plus tard 5, 10 minutes : je viens t'aider lorsque j'ai fini ce que je suis en train de faire ...  Apprendre à attendre, parents et enfants ! Sortir de l'intolérance à la frustration qui mène à l'énervement, parents (et oui ! L'exemplarité est le meilleur enseignement !) et enfants ! 

 

Un temps pour tout

Différents âges, différents besoins. Avant la marche, la posture du parent se doit d'être dans l'accueil inconditionnel, calé sur les besoins de l'enfant, tout en lui donnant un rythme au niveau des repas, du sommeil, dans une attitude maternante de proximité chaleureuse. Là, le tout-petit peut déjà apprendre à patienter quelques secondes avant de manger, le parent peut lui parler, lui expliquer que cela va venir, le temps de préparer le sein ou le biberon.

A partir de la marche, le petit enfant entre dans un stade pulsionnel, opposant, stade du "non" puis du "je", première individuation nécessaire, où il apprend à contrôler ses sphincters. C'est le temps des premières limites bienveillantes, bien dosées, en évitant les frustrations inutiles tout en l'aidant à traverser les autres. Le parent entre dans une dimension conditionnelle. Il s'agit de valider le fait que le petit enfant s'oppose, c'est nécessaire pour sa construction, sans le prendre en frontal : tu as le droit de dire non, et en même temps il faut quand même faire ce que je t'ai demandé ! Tu as le droit de tout vouloir, mais dans la vie on ne peut pas tout avoir ... Détourner l'attention peut aider, focaliser sur autre chose qui plait à l'enfant pour l'aider à passer l'obstacle sans rester bloquer. Utiliser le pouvoir de l'imagination est également utile : est ce que tu sais ce qu'il y a comme dessert après la soupe ? Une comporte de pomme, miam !!  Allez, tu manges encore 3 cuillères et on passe à la compote. 

L'enfant entre 3 et 12 ans est pleinement à l'âge d'apprendre à faire avec le désir de l'autre, et donc du parent. C'est ainsi, en se positionnant en tant que "bon objet" qu'il se construit de façon positive. Ainsi, il est important de pointer tout ce qu'il fait de bien chaque jour (et non ses bêtises, ou ce qu'il ne fait pas ! ) et de le féliciter ! C'est une grave erreur de croire qu'il est "normal" de bien se tenir et de ne faire des remarques seulement lorsque c'est négatif, c'est délétère pour l'estime de soi et met l'enfant en difficulté pour trouver une place suffisamment bonne et valorisante aux yeux du parent, avec le risque alors qu'il apprenne qu'il a plus d'attention lorsqu'il fait des bêtises, et un cercle vicieux se met en place. Piège dans lequel sont empêtrés beaucoup de parents. L'utilisation des sanctions positives aide à (re)trouver une logique positive : qu'est ce que l'enfant gagne lorsqu'il respecte les règles construites ensembles ?

L'adolescent se pose en s'opposant. Il a besoin de s'opposer à ce qui faisant son enfance, pour pouvoir prendre confiance, s'affirmer, se construire en vue de devenir Sujet. Là encore, il est important que le parent ne se butte pas contre l'opposition : tu as raison (de t'opposer) mais il faut quand même débarrasser la table avant le film de ce soir...  C'est l'âge de co-construire les règles de vie, pour que l'ado y adhère un minimum, de fixer les sanctions positives et négatives, et d'avoir un seuil assez bas pour qu'il puisse les transgresser (s'opposer) sans que cela soit dramatique. c'est l'occasion d'expérimenter les conséquences connues à l'avance et de se confronter au principe de réalité.

 

Du "tout" au "pas tout" et "pas tout de suite"

Sortir de l'exigence c'est aussi passer du tout au "pas-tout". Pas demander à l'enfant, ado, de tout faire de façon parfaite, mais accepter ses erreurs, ses tâtonnements, qu'il fasse de façon suffisante. Lui faire grâce comme nous aimerions également que l'on nous fasse grâce à nous, parents. C'est une manière également de créer une dette bienveillante qui incitera l'ado / le futur adulte à respecter ses parents et à les considérer avec bienveillance plus tard.

Pour cela, parents, comment vous faites-vous grâce à vous-même lorsque vous faites des erreurs ? La bienveillance commence par soi !

Attention au burn-out parental !

La gestion du temps est pour beaucoup dans la pression vécue. Or le burn-out est en lien avec la pression interne (exigence perfectionnisme, culpabilité, peurs...) et la pression externe (très forte dans notre société occidentale, travail, budget serré,  normes parentales élevées...). Pour éviter le burn-out, il s'agit de baisser cette ou ces pressions, internes et externes. Pour cela, un accompagnement en coaching est une grande aide, avant que la machine ne s'emballe avec des conséquences sur la santé qui peuvent être tragiques !

 

Des astuces pour éviter les "dépêche-toi"

Utiliser un timer, mettre le minuteur et prévenir à l'avance

Valider les sentiments de l'enfant, ses désirs, sans forcément y répondre

Parler de nos émotions, et notamment de notre tristesse, qui est une émotion qui rapproche (alors que la colère met à distance)

Jouer (jacques à dit mets ton bonnet), lancer un défi, utiliser l'humour

Attirer l'attention sur l'endroit où nous voulons aller

Aider l'enfant à trouver une solution

Dire "je commence à avancer, tu me rejoins..."